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Question d'équilibre...

-       Mais enfin, Madame, je ne comprends pas, je suis déjà venu il y a un moment, vous m’avez renvoyé en me rabrouant, vous deviez nettoyer, soit. Là, je reviens, et vous me criez encore dessus. J’ai du mal à comprendre, et pourquoi il vous faut autant de temps pour nettoyer, et pourquoi vous parlez aussi mal. Ça ne se fait pas, franchement, de parler aussi mal aux gens !!!

 

Julie se faufile dans les toilettes pour femmes, interloquée par les remarques polies quoique excédées de cet homme qui a visiblement moins de chance qu’elle. Une seule toilette, dans le côté femmes, c’est peu pour cette cafétéria de musée, cela doit être pareil chez les hommes. Elle comprend mieux la remarque de sa copine revenue un peu plus tôt, un peu énervée, qu’est-ce qu’elles ont toutes à rester un quart d’heure dans les toilettes, franchement, c’est insupportable, chez les hommes c’est plus rapide, qu’est-ce qu’elles font pendant tout ce temps, elles ne voient pas qu’elles nous font poireauter derrière ! La discussion véhémente continue de l’autre côté, Julie ne comprend pas si l’homme réussit à utiliser les toilettes ou s’il doit rebrousser chemin, bonjour l’ambiance, tout ça pour faire pipi ! En tout cas, elle a pu entrer, elle. Oh, elle aurait pu attendre un peu, mais quand même ; et elle se met à imaginer qu’une envie pressante lui ait tordu les boyaux, que l’accès lui ait été interdit, a posteriori et avec détachement on peut trouver la situation cocasse, mais sur le coup, elle aurait eu du mal à conserver la courtoisie de l’homme qu’elle a entendu en entrant ! Bon, il faut le reconnaitre, les toilettes sont impeccables, c’est déjà un bon point. Elle tire la chasse et sort, elle ne va pas se mettre à passer un quart d’heure là-dedans elle aussi, le groupe l’attend. Elle est en train de se savonner les mains quand la préposée entre :

-       Pour les toilettes du public, c’est au-dessus. C’est fermé. Il faut que vous alliez en haut !!!

Julie reste interdite, les mains pleines de savon, figée par le ton et le regard haineux qui dépasse encore ce qu’elle avait entendu en entrant.

-       Vous permettez quand même que je me rince les mains…

La mégère lui lance un regard encore plus noir. Elle a mis son balai dans le passage pour bloquer toute velléité d’entrée, et elle se met à vaporiser et à vaguement frotter. Franchement c’est déjà propre, qu’est-ce qu’elle pourra bien nettoyer quand Julie sera sortie ?

-       Mais enfin, madame, pourquoi avez-vous besoin d’être aussi désagréable ? Quand je suis entrée, c’était un monsieur qui vous en faisait la remarque. Et là vous ne me laissez même pas me rincer les mains… Je comprends que vous ayez votre travail à faire, mais est-ce que cela vous oblige à traiter ainsi les clients ?

Elle se rince et sort en escaladant le balai, escortée par des marmonnements et par le regard le plus menaçant qu’elle ait jamais essuyé.

 

 

-       Mais, t’en as mis du temps !

Antoine aurait préféré rester plus discret sur son absence. Dans un groupe qui s’arrête dans une cafétéria au milieu d’une promenade, immanquablement plusieurs iront aux toilettes, c’est statistique, même si vous n’avez pas forcément envie que cela se remarque. En général vous vous éclipsez ni vu ni connu, vous faites vite, sauf si…

-       À vrai dire, je ne m’attendais pas à faire le tour du musée…

-       Mais je croyais que t’allais aux toilettes… T’as pas vu qu’il y en a juste là…

-       Si, si, mais c’était fermé, on pouvait pas entrer. C’était en nettoyage. La femme m’a dit d’aller en haut, du coup je me suis perdu, je crois bien que j’ai fait tout le tour avant de trouver les bonnes portes. Faut être motivé, ici, pour aller pisser !

-       En nettoyage, j’y crois pas ! elle va pas recommencer toutes les cinq minutes ! elle venait juste de finir les toilettes des hommes quand elle m’a chassée de celles des femmes ; et ça fait maxi une demi-heure !

Et les conversations vont bon train. Ils ont tous fini leur café. La pause touche à sa fin. C’est pas tout, on ne va pas passer la journée là, c’est vrai que le jardin est agréable, mais quand même, on était venus pour boire un café, pas pour repenser l’organisation du service de la cafet’. Tout le monde est prêt ? Ah non, un des hommes se lève, le plus âgé, il n’en a pas pour longtemps, il revient tout de suite. Les bons mots fusent, qu’il n’entend pas, il est déjà parti, et pas sûr qu’il ait entendu ce qui s’est dit avant, il était au bout de la table, et sa distraction est légendaire. S’il savait, il serait le premier à rire avec eux, et il ne se serait certainement pas déplacé.

 

 

-       Alors…

-       Ben, alors, on y va ? Vous m’attendiez ? Tout le monde est prêt ?

-       Et ça s’est passé comment ?

-       Comment quoi ?

-       Mais t’étais pas aux toilettes ?

-       Si, excusez-moi, mais je ne pensais pas que ça vous intéressait…

-       Et t’es allé où, en haut ?

-       Mais non, il y en a juste là, à côté.

-       Et tu as pu entrer ?

-       Oh, la femme de ménage m’a baragouiné quelque chose, j’ai fait celui qui ne comprend pas, et je suis entré. Elle m’a pris pour un étranger…

-       Ah, t’es fort, toi ! En tout cas, bien, le truc du ménage quand tu veux être tranquille. Je l’appliquerai ailleurs. Tu empêches les gens d’entrer, de te déposer un dossier, de faire une demande, et tu peux roupiller, bouquiner, faire ce que tu veux…

-       Jusqu’à ce que ton patron s’en aperçoive !

-       Question d’équilibre…

 

           

 

 

 



01/01/2017

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